lundi 5 mai 2008

Démagogie

Démagogie : du grec demos, le peuple et ago, conduire. Une fois encore on ne regrette pas ces 4 longues années de cours de Grec ancien. Enfin passons sur cet autre débat.

Comment parler de la démagogie sans tomber dans la démagogie, ou encore pire, dans le débat politiquement orienté ? Et puis zut, l'intégralité des lecteurs de ce blog sont des amis proches et sont donc au fait de mes convictions politiques. Le démagogue est celui qui conduit le peuple. A priori, on peut aussi ne pas être choqué par cela. D'autant plus que le système du gouvernement représentatif repose sur l'élection par les citoyens des meilleurs d'entre eux, pour que ces élites conduisent la politique de la Nation. Pour que les meilleurs, les plus aptes, fassent les bons choix. On part donc du postulat selon lequel le gouvernant est choisi par les gouvernés pour son excellence, sa supériorité dans le domaine politique. Oui mais il faut bien pour que le futur gouvernant soit élu qu'il arrive à convaincre les foules qu'il est bien celui qu'il faut placer à la tête de l'Etat. Et Dieu sait si la foule est volage, parfois brillante, parfois stupide. Infidèle, certains le pensent. Influençable, vous en conviendrez.

Pauvre gouvernant, pour toujours plaire il doit en faire des acrobaties. S'exhiber, se montrer, être beau (cela n'est pas donné à tous le monde, ciel que la vie est injuste !), être drôle quand il le faut, et très sévère quand le besoin s'en fait sentir. Ne pas oublier ses talons. Passer après sa femme, pour descendre d'un avion. Séduire plutôt que convaincre. Le côté obscur de la Force n'est pas loin. Il est bien plus facile de prendre le chemin de la facilité, d'être un hypocrite (du grec upokritès, l'acteur) que quelqu'un qui assume le poid du pouvoir. Les plus forts ne sont pas toujours les plus beaux.

Il me semble que Platon faisait des démagogues le cancer qui ronge toute démocratie. Avait-il tort ? Pour moi, il avait fort raison si on ramène la démocratie au choix par l'élection. Ce qui n'était pas le cas par exemple si on pense à la démocratie athénienne où le tirage au sort tenait une grande place. Mais aujourd'hui il a disparu. Celui qui gouverne est donc celui qui a su convaincre ou séduire les foules. Par ses frasques, ses unes de Gala, Paris Match et autres Closer. Ses amours, sa rupture, ses courses à pied. Monsieur Regardez-moi-je-suis-pire-que-vous-vous-pourriez-être-à
-ma-place-le-mérite-c'est-fantastique.

Le plus gros problème, outre le fait que la démagogie n'ait jamais aussi bien fonctionné que de nos jours, est d'y trouver une parade. Je n'en vois pas. Mesdames et messieux, Platon a raison. La politique se métamorphose, tout le monde en est bien conscient. La rupture est là, partout. La retenue et l'humilité sont devenus des défauts. Le bling-bling parle plus à l'électeur que le paquet fiscal dans un pays endetté comme la France. Ou en tous cas, il est bien plus facile pour celui qui vote d'entendre parler de vacances sur un yacht que de politique au sens strict. Les médias ont remplacé l'Eglise au fourreau du démagogue. Un ennemi de plus pour la République. Qu'elle s'accroche à ses principes, et nul doute qu'elle vaincra. Quand à vous ouvrez les yeux, car l'heure est plus grave qu'il n'y parait. N'oublions pas que l'histoire est un cycle où les mêmes schémas se répètent inlassablement. Réfléchissez. Sinon, advienne que pourra.

1 commentaire:

  1. La Phaze : "C'est l'idéal bling-bling et le lobby des marques"

    Tout est dit… Il me semble cher ami Pierre que la démagogie c'est aussi projeter à un peuple une image que l'on maitrise et qui a vocation à devenir le standard. Qui dit standard dit en effet contrôle sur la population et orientation des votes. Car le démagogue ne se contente pas de lisser dans le sens du poil l'électorat (de tout poil soit dit en passant) à l’approche d’une élection. Non, éternel insatisfait, il se complait dans l'action politique que j'appellerai "normalisante", celle qui vise à inculquer à son peuple un carcan culturel et qui passe actuellement par des pratiques gouvernementales chic et choc. Simple manie ? Penchons plutôt pour une entreprise de pérennisation du pouvoir au profit d’une certaine élite.

    Mais si il y a une chose que je voulais souligner au-delà de tes propos c’est effectivement la collusion de la démagogie et des notions d’élite et de lobby. Car tout démagogue n’a pas besoin seulement du peuple en tant qu’électorat mais également de l’approbation des milieux économiques (dont la puissance est assez faramineuse...). En outre l’histoire a montré que les démagogues issus de tous milieux formaient bien souvent une fois au pouvoir une clique élitiste à l’insu de leur population (les plus grands démagogues ne sont-ils pas nos récents et sanglants dictateurs européens ?). Ainsi en envoyant à la population un message normalisant et en feignant la compréhension des problèmes populaires le démagogue peut-il créer l’apparence d’une bienheureuse proximité avec ses citoyens. Et les éloigner d’autant plus de la compréhension des problèmes et de la prise de décision démocratique. A ce titre nous avons certainement des enseignements à tirer de la confiscation référendaire dont nous avons été victimes dans le processus du traité de Lisbonne.

    La politique étant un cycle on peut effectivement penser que les choses changeront cependant il faut espérer que derrière l’écran de fumée démagogique le mal n’est pas déjà fait. Paranoïaque pour certains, conscient pour d’autres pour ma part je pense que nos droits sont en danger et qu’il est temps de prendre conscience que la démocratie respire artificiellement.

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